L'equivalence dans la traduction des textes litteraires oriente la demarche de notre etude qui repose sur la solidarite de la theorie de la traduction et de la theorie de la litterature. Sur le plan theorique, l'equivalence semantique de la traduction ...
L'equivalence dans la traduction des textes litteraires oriente la demarche de notre etude qui repose sur la solidarite de la theorie de la traduction et de la theorie de la litterature. Sur le plan theorique, l'equivalence semantique de la traduction consiste en trois unites differentes : code, sens, signifiance. "Le code", unite du transcodage, et "le sens", expose par la theorie du sens, se situent au niveau du discontinu du signe qui implique la division entre la forme et le sens, et la superiorite de ce dernier sur la premiere. Au contraire, la poetique du traduire deplace, en developpant la notion de "la signifiance", la theorie de la traduction du discontinu du signe au continu du discours et le texte comme unite. Elle decoule de la reconnaissance que le texte litteraire, etant une activite du langage, manifeste sa particularite a travers la pratique d'un sujet par le signifiant. Elle vise donc a la specificite du discours afin d'y reconnaitre le rythme et la prosodie comme une semantique generalisee.
Par exemple, dans Les Sonnets de Shakespeare, le terme "fair" est souvent entoure de mots qui sont en relation reciproque avec lui par l'echo prosodique et qui caracterisent, par ce rapport prosodique, sa qualite de beaute ou suggerent son destin malheureux, la negativite de "Dark lady". Il s'agit de la semantique de la prosodie specifique que le texte original organise autour du mot "fair", et donc de la particularite de l'ecriture de Shakespeare. Mais cette particularite est souvent supprimee dans la traduction en francais, soit par une meconnaissance du travail de signifiance, soit par une difficulte de la langue due a la difference des champs lexicaux entre l'anglais et le francais.
Par contre, la traduction des Sonnets par Bournet et Bournet s'oriente non vers l'intraduisibilite, mais vers la traduisibilite de la signifiance par une reflexion sur le contexte rythmique et prosodique. Elle implique une tentative de chercher l'unite de sens dans le poeme, passant outre a la position myope qui renvoie aux sens des mots isoles. En refusant le concept du "genie" de la langue francaise, et parallelement en faconnant des mots a leur facon dans leur grammaire, Bournet et Bournet situent leur traduction par une activite d'un sujet, et impriment la particularite de leur ecriture. Cela nous montre que le resultat d'une traduction peut etre aussi un texte trans-subjectif, en ce qu'il passe d'une "langue-culture" a une autre "langue-culture". Il y a la, la possibilite dans laquelle la traduction du texte litteraire comprend sa specificite et sa litterarite.